La loi PACTE, pour la croissance et la transformation des entreprises, a été promulguée le 22 mai 2019 sous l’impulsion de Bruno Le Maire. Elle visait à lever les obstacles à la croissance des entreprises à toutes les étapes de leur développement, de la création à la transmission, en passant par le financement. Ce projet ambitieux avait également pour objectif de mieux partager la valeur créée par les entreprises avec les salariés et de permettre aux entreprises de mieux intégrer les enjeux sociaux et environnementaux dans leur stratégie. Où en sommes nous 5 ans plus tard ?
La loi PACTE visait à
– Faciliter la création et la transmission d’entreprises, ainsi que la reprise en cas d’échec.
– Favoriser la croissance des PME en limitant à trois les seuils déclenchant de nouvelles obligations légales, par exemple en matière de déclarations ou de taux applicables aux cotisations sociales.
– Réorienter l’épargne vers l’économie réelle en dirigeant les fonds des produits d’épargne retraite, auparavant destinés à financer la dette publique, vers le soutien aux entreprises, ce qui incluait la privatisation de trois grandes entreprises : Française des Jeux, Aéroports de Paris et Engie, afin de financer un fonds pour l’innovation de rupture.
– Rendre l’entreprise plus juste et responsable. La loi a modifié le Code civil (article 1833) pour inclure dans l’intérêt social de toutes les sociétés la nécessaire prise en considération des enjeux sociaux et environnementaux de son activité.
De plus, toutes les sociétés peuvent désormais se doter d’une raison d’être dans leurs statuts (article 1835) constituée des principes dont la société se dote et pour le respect desquels elle entend affecter des moyens dans la réalisation de son activité ou aller encore plus loin en adoptant la qualité d’entreprise à mission.
La faculté de définir une « raison d’être » statutaire
La loi PACTE a instauré la possibilité pour les entreprises volontaires d’inscrire une raison d’être dans leurs statuts. La raison d’être représente le sens que l’entreprise donne à ses activités, au-delà de sa seule finalité économique.
En définissant leur raison d’être, les entreprises offrent un cap commun à leurs salariés, et apportent du sens à leurs activités professionnelles. Cela permet également d’embarquer les clients via un message impactant et des convictions partagées.
La mise en avant de la qualité « d’entreprise à mission »
Pour devenir entreprise à mission, les entreprises doivent au préalable se doter d’une raison d’être.
Adopter la qualité de société à mission implique pour l’entreprise de modifier ses statuts pour inclure une raison d’être et des objectifs de mission. L’entreprise à mission implique également de mettre en place un double contrôle interne pour suivre la mission (soit par la nomination d’un référent de mission pour les petites entreprises sous condition de seuil, soit par la création d’un comité de mission) et externe via la vérification de la mission menée par un organisme tiers indépendant (OTI). Les avis de cet organisme, publiés tous les deux ans sur le site internet de l’entreprise, doivent assurer la transparence et la sincérité des engagements, bien qu’aujourd’hui cette obligation ne soit pas encore complètement remplie : selon une étude réalisée par KPMG en mai 2023 auprès de 50 sociétés à mission, seulement 56 % des entreprises interrogées auraient fait vérifier leur rapport par un OTI.
Toutefois, “même si les textes ne prévoient pas de sanctions pénales ou financières en cas de non-respect des objectifs de la mission, le Code prévoit une sanction claire, la perte du droit de faire état publiquement de la qualité de société à mission. Surtout, l’enjeu réputationnel est essentiel pour les entreprises qui se doivent d’être alignées entre leur communication et leurs actions”, rappelle Juliane Dessard Jacques, avocate spécialisée en droit des sociétés, impact et RSE.
Les bénéfices à obtenir la qualité de société à mission sont nombreux. “Devenir entreprise à mission, c’est se doter d’une vision claire partagée par l’ensemble des parties prenantes, précise Juliane Dessard Jacques, d’une boussole stratégique qui guide les actions et activités de l’entreprise avec un double contrôle qui crédibilise la démarche et une gouvernance élargie par le comité de mission qui enrichit le processus décisionnel.
Levier RH important, la qualité d’entreprise à mission séduit aussi les talents qui souhaitent se retrouver dans un cadre de travail porteur de valeurs partagées. Sans compter que cette qualité est de plus en plus valorisée dans les démarches de référencement auprès des institutions publiques et des grands groupes.
Fin 2023, on comptait plus de 1 490 sociétés ayant adopté cette qualité, soit une augmentation de plus de 34 % par rapport à 2022. Parmi les 287 grandes entreprises en France, 14 avaient déjà franchi le pas. Cela montre que, malgré les défis associés à cette qualité, la tendance vers des pratiques plus responsables commence à se développer parmi les entreprises.