Le 29 février 2024, à l’Assemblée Nationale, a été lancée l’Union pour le Réemploi Solidaire par les principaux acteurs du réemploi solidaire. Elle est portée par six réseaux nationaux : COORACE, EMMAÜS France, Envie, ESS France, L’Heureux Cyclage, Réseau National des Ressourceries et Recycleries.
“La nécessité de consommer moins et mieux devient une urgence” selon l’Union pour le Réemploi Solidaire. En effet, le phénomène de surconsommation, à savoir consommer des biens ou des services en quantités excessives, dans les pays les plus riches, entraîne une dégradation de l’environnement mondial, comme en attestent de nombreux rapports et études, dont celui par exemple de l’Unicef qui date de 2022.
Face à ce fléau, une solution simple : le réemploi. C’est avec pour objectif de sensibiliser la société aux enjeux écologiques et au besoin de changer plus rapidement nos comportements que l’Union pour le Réemploi Solidaire voit ainsi le jour.
Dans le socle fondateur : une consommation plus durable et solidaire, le principe de pérennité programmée (soit le contraire de l’obsolescence programmée : il s’agit ici d’éco-concevoir un produit, en tenant compte de son évolution future, en faisant en sorte qu’il soit durable, de limiter les opérations de maintenance et de faciliter son recyclage ou la possibilité de lui offrir une seconde vie) et la normalisation du réemploi et de la réparation.
L’Union pour le Réemploi Solidaire se veut être le porte parole des intérêts des structures de l’économie sociale et solidaire spécialistes des activités de réemploi tout en valorisant leurs actions.
Qu’est-ce que le réemploi solidaire ?
Le réemploi solidaire est une pratique qui vise à réutiliser des objets plutôt que de les jeter. On leur donne une seconde vie dans une logique non lucrative : l’argent récolté est exclusivement reversé au projet de réemploi, en faisant généralement travailler un public lui-même éloigné de l’emploi et en réinsertion professionnelle. Par la même occasion, en pratiquant le réemploi, on contribue ainsi à la réduction des déchets et on favorise l’inclusion sociale. Le réemploi est une pratique qui s’inscrit donc dans une perspective écologique et sociale, c’est un outil important de transformation de la société.
Quelles différences avec le réemploi lucratif ?
Contrairement au réemploi lucratif, le réemploi Solidaire consiste à récupérer, réparer et revendre localement ou en ligne, via des canaux de vente éthiques, tous types d’objets. Et ce, sans distinction de leur valeur marchande. L’objectif est de rendre les biens courants accessibles à tous, à des prix solidaires, tout en réduisant la production de déchets.
Les principaux objectifs de l’Union pour le Réemploi Solidaire
- Faire du Réemploi Solidaire la norme de demain
- Démontrer son caractère pionnier et innovant
- Affirmer sa singularité face au développement du réemploi lucratif
- Inventer de nouveaux cadres permettant de préserver et développer les activités citoyennes historiques
- Sensibiliser le grand public à la valeur du Réemploi Solidaire en ligne
- Oeuvrer pour une plus forte réparabilité des produits et lutter contre l’obsolescence programmée
Les huit principes directeurs de l’Union pour le Réemploi Solidaire
- L’Union vise à sensibiliser à la nécessité de changer nos comportements
- Lutter contre l’obsolescence programmée
- Promouvoir la solidarité
- Favoriser le “non-lucratif”
- Promouvoir les circuits courts
- Promouvoir la gouvernance partagée
- Favoriser la coopération entre les différentes structures de l’Économie Sociale et Solidaire (ESS)
- Développer un maillage territorial fin et complet
Le secteur du réemploi en difficulté
L’Union pour le Réemploi Solidaire est une réponse à la difficulté que rencontre le secteur du réemploi malgré des objectifs de prévention de la production de déchets par la loi Anti-Gaspillage pour une Économie Circulaire de février 2020.
Ces difficultés concernent trois domaines :
- Les fonds de réemploi
Un écart se dessine entre les dispositions de la loi Anti-Gaspillage pour une Économie Circulaire et leur mise en œuvre concrète. Cette loi prévoit des quotas minimums mais dans la réalité, ces exigences se traduisent souvent par un plafond maximum, limitant ainsi la capacité à atteindre les objectifs de réemploi fixés pour la filière en question.
- Le foncier disponible
Les structures n’arrivent pas toujours à trouver du foncier disponible pour développer leurs activités de réemploi.
- La concurrence d’accès aux objets
La demande des offres de seconde main est croissante, ce qui a amené le secteur lucratif à s’emparer du réemploi comme la revente de biens entre particuliers. Cette évolution risque de compromettre la solidarité et de favoriser l’appropriation de produits à forte valeur ajoutée par ces acteurs à vocation lucrative.
Pour remédier à ces difficultés, l’Union pour le Réemploi Solidaire a établi 7 propositions.
Les 7 propositions pour faire du réemploi solidaire la norme
- Agir sur les changements de comportement
L’Union recommande d’orienter au moins 2 % du budget général des éco-organismes vers le financement d’actions de sensibilisation des citoyens à la prévention des déchets.
- Garantir l’accès à une offre de Réemploi Solidaire pour toutes et tous à moins de 15 minutes de chez soi
L’Union appelle à la mise en place de politiques publiques en matière de réemploi via des actions de planification territoriale permettant la mise à disposition de foncier pour les structures.
- Déployer des moyens financiers à la hauteur des enjeux écologiques et sociaux
Pour cela, l’Union a eu 4 idées : une somme de 500 millions d’euros des crédits France 2030 vers les activités de Réemploi Solidaire, la redirection d’une partie de la taxe générale sur les activités polluantes vers les acteurs du Réemploi Solidaire, privilégier les soutiens par subventions publiques et créer un Fonds unique pour le Réemploi Solidaire.
- Définir les barèmes de soutien au Réemploi Solidaire par l’État dans le cadre d’une vision de filière prospective et ambitieuse
L’Union pour le Réemploi Solidaire souhaite que l’Etat garantisse la prise en charge de 80 % des coûts engagés par les activités de Réemploi Solidaire.
- Garantir aux structures de l’ESS un accès à des gisements d’objets de qualité
L’Union propose la création d’une obligation faite aux distributeurs de remettre l’intégralité de leurs gisements collectés auprès des particuliers aux structures de l’Économie Sociale et Solidaire spécialistes du réemploi et demande la création d’un groupe de travail piloté par l’Etat pour travailler sur l’accès aux gisements.
- Créer l’Ecole nationale du Réemploi Solidaire
Afin de sécuriser l’accès aux matières premières et soutenir l’émergence de talents, l’Union pour le Réemploi Solidaire souhaite créer l’Ecole nationale du Réemploi Solidaire avec un soutien de 5 millions d’euros dans le cadre du programme France 2030.
- Faire de la réparation un réflexe pour chaque citoyen qui soit source d’économies et de réduction de son empreinte environnementale
Il existe des services de montée en compétences des citoyens aux techniques d’auto-réparation, l’Union pour le Réemploi Solidaire souhaiterait les multiplier par trois grâce aux fonds réparation des filières concernées d’ici 2030.
La structure de l’Union pour le Réemploi Solidaire
Les 6 réseaux nationaux sont composés de plus de 2000 structures connectées dans des logiques de coopération territoriale dispersées dans toute la France. Ces organisations comptent plus de 20 000 bénévoles, plus de 7 millions de bénéficiaires et réemploient environ 200 000 tonnes d’objets par an.
L’économie sociale et solidaire
L’économie sociale et solidaire (ESS) regroupe des entreprises qui adoptent des structures telles que des coopératives, des mutuelles, des associations ou des fondations. Leur mode de fonctionnement et leurs activités reposent sur des principes de solidarité et d’utilité sociale.
La loi du 31 juillet 2014 prévoit que l’économie sociale et solidaire est un mode d’entreprendre correspondant aux personnes morales de droit privée qui ont cumulativement un but autre que le seul partage des bénéfices, une lucrativité limitée et une gouvernance démocratique. Au cœur de l’économie sociale et solidaire se trouvent la réinsertion, la lutte contre l’exclusion et le développement local.
Les structures d’économie sociale et solidaire sont des acteurs majeurs du réemploi depuis plus de 70 ans.
Les six réseaux nationaux, acteurs de l’économie sociale et solidaire
Six réseaux nationaux spécialisés dans le réemploi sont porteurs du projet de l’Union pour le Réemploi Solidaire. Ces réseaux donnent accès aux citoyens aux produits de seconde main et participent à les sensibiliser aux mouvements de réemploi. Ce sont des solutions de proximité et des lieux permettant de sensibiliser également à la surconsommation. Vecteurs de transition écologique, ces lieux sont synonymes de convivialité et d’échange.
Ce sont les suivants :
- Coorace
Le réseau Coorace rassemble 600 entreprises d’utilité sociale et territoriale, elle a 3 missions pour accompagner les entreprises d’utilité sociale : Améliorer l’impact social et territorial,le parcours vers l’emploi et l’accompagnement de projets de territoire.
- EMMAÜS France
Le réseau Emmaüs collabore avec les personnes exclues pour développer des solutions qui leur permettent de reprendre le contrôle de leur vie. Emmaüs, c’est plus de 30 000 personnes rassemblées à travers la France et une présence dans 37 pays. L’activité de réemploi solidaire est au cœur du projet Emmaüs depuis la création de la première Communauté en 1949.
- Envie
Fondé en 1984, le réseau Envie s’engage dans l’insertion par le travail et la formation professionnelle des personnes en situation de fragilité et ayant des obstacles à l’accès à l’emploi. Les entreprises membres du réseau Envie sont spécialisées dans la réparation et la vente d’appareils électroménagers ainsi que d’équipements médicaux.
- ESS France
Reconnue comme l’instance représentative de l’Économie Sociale et Solidaire (ESS) depuis l’adoption de la loi de 2014 sur l’ESS, ESS France joue le rôle de Chambre Française de l’Économie Sociale et Solidaire. Elle a pour mission de représenter et de promouvoir l’ESS ainsi que ses modèles auprès des autorités publiques et du grand public.
- L’Heureux Cyclage
Ce réseau fédère plus de 180 associations en France qui animent sans but lucratif des ateliers vélos. Elles ont une activité de promotion vélo dont le réemploi des vélos inutilisés, l’apprentissage de la mécanique, la promotion de l’utilisation du vélo au quotidien et le recyclage des matières premières issues des vélos.
- Réseau national des ressourceries et recycleries
Ce réseau a été créé le 26 septembre 2000 et compte plus de 200 structures en son sein. En plus de son objectif de donner une seconde vie aux objets, s’ajoute l’objectif d’éducation à l’environnement et de promotion de comportements écocitoyens. Enfin, il a un objectif de développement des solidarités qui passe notamment par la création de communautés d’entraide et d’activités citoyennes.
Pour en savoir plus :
Coorace
EMMAÜS France
Envie
ESS France
L’Heureux Cyclage
Réseau national des ressourceries et recycleries