Alors que le texte relatif à la CSRD (Corporate Sustainability Reporting Directive) est actuellement en discussion à la Commission européenne pour une révision éventuelle du texte, l’AEF Info a organisé un webinaire centré sur les défis liés à cette directive le 5 février 2025. Ce temps d’échange a réuni trois experts en RSE/ESG qui ont déjà fait l’exercice du rapport de durabilité : Clément Jeannin (Unibail-Rodamco-Westfield), Pierre-Yves Burlot (Séché Environnement) et Lenaic Pineau (JCDecaux). Chacun d’eux a partagé son expérience sur l’anticipation de la CSRD et les défis rencontrés par leurs entreprises.
Pourquoi anticiper la CSRD ?
Les intervenants ont souligné que l’anticipation des exigences de la CSRD, notamment à travers le concept de double matérialité, a permis à leurs entreprises de mieux structurer leur stratégie RSE.
Clément Jeannin a expliqué qu’Unibail-Rodamco-Westfield a aligné sa stratégie RSE sur les exigences de la CSRD dès le départ, pour rendre la mise en œuvre plus fluide. Selon lui, cette anticipation a permis de mieux identifier les défis à venir.
Pierre-Yves Burlot, quant à lui, a évoqué l’avantage concurrentiel qu’il voit dans la réponse aux critères extra-financiers imposés par la CSRD. Séché Environnement a démarré l’analyse de la matérialité dès 2019, un choix qu’il juge stratégique pour produire des indicateurs plus fiables. Il a néanmoins exprimé le souhait que davantage de flexibilité soit accordée aux entreprises pour garantir la qualité des indicateurs.
JCDecaux a opté pour une approche proactive en intégrant des outils de calcul de l’empreinte carbone dans ses services pour ses clients. Leur calculateur permet d’évaluer les externalités négatives, y compris dans le cadre de leur stratégie Net-Zero 2050 et de réduction de 50% des scopes d’ici 2030. Leur objectif est d’accompagner leurs clients dans l’amélioration de leur scope 3, une démarche clé de la CSRD.
Les défis de l’Audit et les recommandations des intervenants
L’un des principaux obstacles rencontrés par les entreprises concerne l’audit. Clément Jeannin a mis en lumière la complexité de produire des informations suffisamment « auditées », tout en soulignant la rigueur des auditeurs qui exigent des preuves solides.
Pierre-Yves Burlot a quant à lui alerté sur l’énorme coût en termes de temps consacré à la préparation de l’audit. Selon lui, le temps investi dans l’élaboration d’informations vérifiables devrait être davantage alloué à la transformation du modèle de l’entreprise pour le rendre plus durable.
Lenaic Pineau a insisté sur la nécessité d’une meilleure compréhension des textes et d’une interprétation commune des exigences. Il a également souligné l’importance de s’entourer de partenaires auditeurs fiables, réactifs et disponibles pour accompagner les entreprises dans leur démarche.
Simplifications possibles et préconisations
Les intervenants ont convenu qu’un des principaux défis réside dans la complexité de l’audit, en particulier pour les TPE et PME. La granularité dans la vérification de la double matérialité est également perçue comme un frein.
Malgré ces difficultés, il est unanimement reconnu que la CSRD constitue un avantage compétitif sur le marché européen. Lenaic Pineau a souligné l’importance de ne pas « vider » la CSRD de sa substance, malgré la complexité des textes.
Conseils pratiques pour les entreprises en retard
Pour les entreprises qui n’ont pas encore démarré leur démarche, les intervenants recommandent une approche méthodique : commencer par appréhender la double matérialité, benchmarker les meilleures pratiques et développer des compétences internes pour fluidifier la démarche.
Le coût de la CSRD
Enfin, Clément Jeannin a évoqué le coût relativement faible de la mise en conformité à la CSRD pour Unibail-Rodamco-Westfield, estimé à une dizaine de milliers d’euros. Cela démontre que l’investissement nécessaire, bien qu’important, reste abordable pour les grandes entreprises.
L’adaptation aux exigences de la CSRD nécessite une approche claire, structurée et bien anticipée.